La Chine ? Gen ?ve pour le p ?trole africain

jeudi 25 mars 2010,par Jean Bosco Nzosaba

Deuxième place mondiale en matière de trading pétrolier, Genève est le théâtre d’une bataille pour le contrôle des champs de pétrole africain. Décryptage d’un enjeu mondial où la Chine joue les premiers rôles.

Catherine Fiankan-Bokonga/InfoSud - En matière de négoce pétrolier, Genève a considérablement renforcé sa position de 2e place mondiale, après Londres, avec l’arrivée en 2009 de Sinopec, première compagnie pétrolière chinoise, et le débarquement prochain de Petrochina, géant chinois du gaz et du pétrole. Ces compagnies rejoignent ainsi pratiquement tous les négociants de poids du domaine du trading pétrolier mondial. Récemment, on a pu assister à une tension grandissante entre la République démocratique du Congo et l’Angola, de même qu’entre la Côte d’Ivoire et son voisin ghanéen. Ces crispations font suite à la découverte et l’exploitation d’importants gisements pétroliers au large des côtes de ces pays. Aucun lien visible ne semble rapprocher ces faits se déroulant à la fois en Afrique et dans la ville de Calvin. C’est pourtant le contraire qui est vrai. Premièrement, l’énorme potentiel pétrolier du continent africain est plus que jamais au centre de toutes les attentions. « Les prévisions faites il y a à peine trois ans sont très largement dépassées et différentes estimations donnent à penser que la production pétrolière de l’ensemble du continent africain passerait à près de 15% du total mondial vers 2020  », souligne l’économiste Nicolas Sarkis, directeur du Centre Arabe d’Etudes Pétrolières à Paris. Et ce alors qu’entre 1990 et 2004, la production pétrolière africaine a augmenté de 40%. Deuxièmement, compte tenu du rythme et de l‘importance des nouvelles découvertes en Afrique, les grands groupes pétroliers internationaux ont toujours conservé un œil sur le Continent. D’ailleurs, la majorité des réserves africaines de pétrole est toujours détenue par les « Big Five  » (Total, BP, Chevron, Shell et Exxon Mobil). Mais ce sont les événements du 11 septembre 2001 qui ont déclenché une véritable ruée sur l’Afrique. Dès cette date le pétrole africain est devenu une priorité pour les Etats-Unis, désireux de réduire leur dépendance à l’égard du Moyen-Orient. Le secrétaire d’état adjoint pour l’Afrique, Walter Kansteiner, avait indiqué en 2002 que « le pétrole de l’Afrique occidentale est devenu pour nous un objectif d’intérêt stratégique national  ». Nicolas Sarkis confirme : « Le pétrole africain couvre actuellement près du cinquième des importations américaines et le tiers des importations chinoises  ». Prime à l’exploration La crise financière qui ébranle actuellement l’économie mondiale, n’a fait que renforcer cette tendance. Désormais les grands groupes pétroliers se recentrent sur les activités d’exploration et de production plus rentables que le raffinage et la distribution. Il est donc vital pour ces opérateurs de s’installer en Afrique et d’obtenir les droits d’exploitation de l’or noir à venir. Pour la Chine, son extraordinaire développement est assorti d’une demande croissante en matières premières et en ressources énergétiques. Ce sont ses besoins croissants en pétrole qui la pousse à augmenter sa pugnacité sur le continent noir et à asseoir sa présence dans le domaine pétrolier africain où la concurrence avec l’Inde et la Russie fait rage. Mais ces derniers temps, la Chine a essuyé plusieurs revers dans ses tentatives de prendre la place des compagnies occidentales sur certains champs pétrolifères africains. La carte genevoise Raison pour laquelle la Chine est venue à Genève pour racheter Addax Petroleum, un des plus grands producteurs pétroliers indépendants en Afrique et au Moyen-Orient, dont le siège social est à Genève. En effet, avec cette prise de contrôle estimée à 7,8 milliards de francs, la chinoise Sinopec détient désormais des permis d’exploitation pétroliers et gaziers en Afrique (Nigeria, Gabon et Cameroun). Dans le même temps, Genève a attiré des filiales de sociétés nationales d’opérations pétrolières africaines à Genève, telle l’ivoirienne Petroci International fin 2009, et de sociétés privées proches des compagnies d’Etat africaines telle l’angolaise Somoil. Une dynamique qui profite aussi de la présence à Genève de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), des institutions qui assurent le passage d’éminents spécialistes et de diplomates de hauts niveaux et qui permettent d’organiser des négociations en toute discrétion.

 

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