L’association DUSHIREHAMWE et feu Ernest Manirumva prim ?s

vendredi 6 novembre 2009,par Jean Bosco Nzosaba

Déclaration du délégué général de FORSC à l’occasion de la remise du Prix du « Meilleur acteur de la société civile  » 5 novembre 2009 Excellence Monsieur le Premier Vice-Président de la République Honorables parlementaires, Mesdames, Messieurs les représentants du corps diplomatique et consulaire, Mesdames, Messieurs les représentants des partis politiques, Mesdames, Messieurs les représentants des organisations de la société civile, Mesdames, Messieurs les représentants des organisations et structures partenaires de la société civile, Distingués invités,

Nous sommes rassemblés ici pour remettre le prix du meilleur acteur de la société civile. Cette petite cérémonie clôt la journée porte ouverte que nous avons organisée pour permettre aux citoyens engagés dans des associations de se rencontrer et d’échanger, aux autorités, aux médias, au public, aux représentants des organisations internationales de mieux nous connaître, de découvrir la diversité des initiatives prises par les nombreux acteurs de la société civile. L’expression « société civile  » est couramment employée aujourd’hui, mais sous cette appellation unique, vous avez pu constater en parcourant les stands, qu’elle désigne en fait une multitude d’organisations, chacune ayant sa mission, sa méthode, son histoire, sa vision, on pourrait presque dire sa personnalité. En tant que du FORSC (Forum pour le Renforcement de la Société Civile), une plateforme qui ne rassemble pas moins de 146 collectifs et associations, je peux témoigner que la société civile ne peut se réduire à un acteur unique de la vie sociale du pays. C’est un ensemble divers où chacun à son rôle, sa place, sa voix propre. Tous méritent qu’on leur rende ici hommage pour le dévouement dont ils font preuve et pour la contribution qu’ils apportent à la vie de notre Burundi et à l’amélioration de la situation de nos concitoyens. Cette diversité n’empêche pas cependant que la société civile joue un rôle spécifique dans la vie sociale du pays. En distinguant le meilleur acteur de la société civile, nous voulons justement illustrer ce rôle. Qu’est-ce qu’un bon acteur de la société civile ? Une organisation de la société civile, c’est d’abord une initiative prise par des citoyens qui se soucient de l’intérêt général, qui s’associent, s’organisent pour prendre en charge leurs problèmes, pour promouvoir des droits, pour mobiliser des énergies en faveur d’une cause. Comme le montrent les thèmes présentés dans le salon, pas un secteur de la vie de notre pays n’est absent de leur engagement, l’éducation, l’agriculteur, la jeunesse, la santé, la promotion des droits de l’homme, la bonne gouvernance, l’environnement, la justice, le genre, etc. Un acteur de la société civile ne défend pas ses intérêts personnels. Même s’il agit en faveur d’une catégorie de la population (les femmes, les agriculteurs, etc ) ce n’est pas pour diviser la société, pour agir au détriment des autres catégories. C’est pour fournir un service utile. Les pouvoirs publics mènent des actions pour améliorer la situation de la population. Nos organisations peuvent agir à une échelle différente, plus proche, sur un objet plus spécifique. La société civile, par sa proximité avec la population, par la souplesse de son organisation, peut explorer des voies nouvelles. Mais notre mission ne se limite pas à fournir un service. Elle essaie aussi de faire en sorte que la voix de chaque catégorie de population soit mieux entendue. Un bon acteur de la société civile permet aux citoyens de s’exprimer. Sur ses besoins, ses attentes. Ce n’est pas une expression pour nuire à la cohésion de la société, au contraire. Une société où chacun peut être écouté, entendu, pris en compte est une société plus harmonieuse. C’est une condition de la paix.

Le but de cette expression n’est pas de servir d’argument aux forces politiques dans leur entreprise de conquête du pouvoir. Elle n’a pas vocation à être récupérée pour d’autre fin que celle que poursuit la société civile : contribuer à exprimer les besoins de la société, animer le débat sur les solutions à mettre en œuvre, contribuer à faire valoir les priorités des citoyens. En revanche, les acteurs politiques gagnent à être à l’écoute de ce que propose la société civile. Les dirigeants politiques se voient confier par la collectivité nationale, la responsabilité de gérer les affaires communes au nom de tous. Il leur revient d’élaborer les politiques et de prendre des décisions. La société civile n’a pas vocation à se substituer à eux, à s’attribuer des prérogatives de la puissance publique, mais ce qu’elle exprime contribue à éclairer ses choix. Un bon acteur de la société civile est celui qui fait donc le lien entre les besoins concrets des citoyens et les propositions de politiques publiques. On reproche parfois à la société civile d’adopter une attitude de critique systématique. D’être une force négative. A cette objection, nous répondons avec conviction que la société civile est une force pour bâtir. Les critiques que nous pouvons formuler sont l’expression de la vigilance des citoyens sur l’exercice des responsabilités publiques. Cette vigilance est une preuve de santé démocratique. Vouloir nous réduire au silence, c’est risquer la dérive vers l’exercice solitaire du pouvoir. Un pouvoir sourd à l’expression de ses citoyens se coupe de la réalité. Il finit par confondre ses intérêts et ceux de la population. Cette évolution sape les fondements de la paix. A l’heure où je m’exprime, il m’est très difficile de passer sous silence une affaire grave qui illustre cette nécessité et suscite notre plus vive préoccupation. Suite aux violences exercées sur Monsieur NSABIRIHO Salvator par des éléments de police en date du 13 octobre 2009, cet homme honorable est décédé ce matin à l’Hôpital Prince Régent Charles. Ces violences ont été infligées devant témoins sur ordre direct du gouverneur de la Province de Kayanza. Nous ne pouvons faire autrement que de saisir les plus hautes autorités du pays pour qu’elles prennent les mesures qui s’imposent, en l’occurrence exiger la démission de ce gouverneur qui abuse de l’autorité de l’Etat qui lui a été déléguée dans l’intérêt des citoyens, afin qu’il réponde de ses actes devant la Justice.

La société civile, comme d’autres acteurs de la vie publique, les médias, les formations politiques, les assemblées législatives contribue à revivifier en permanence la démocratie, qui comme chacun le sait, est une construction de chaque jour, et n’est jamais définitivement acquise. Renoncer à ce rôle, se limiter dans notre expression, s’autocensurer par crainte d’être mal compris, c’est déjà entériner un recul de la démocratie. En faisant usage de leur liberté d’expression, de leur liberté d’association, de leur liberté de circulation, les citoyens membres d’organisations de la société civile ne font qu’exercer les droits reconnus à tout citoyen par la loi et la Constitution burundaises, comme par les instruments juridiques internationaux. Ni plus, ni moins. C’est la source de notre légitimité. Nous nous félicitons de vivre dans un pays où ses droits sont reconnus et peuvent être exercés. C’est un privilège que nous avons acquis après des années d’épreuves. Nous nous efforçons de l’exercer de manière responsable, mais nous n’entendons pas y renoncer. Récemment, nous avons déploré l’interdiction de quelques activités d’organisations de la société civile. Nous voulons croire qu’il s’agit de malentendus que les autorités compétentes dissiperont rapidement.

Cette faculté d’être un acteur autonome de la vie sociale du Burundi, nous comptons l’exercer pleinement durant la période qui s’annonce. L’année 2010 sera une année d’intenses débats en vue de choisir ceux auxquels nous, Burundais, allons confier la charge de gérer nos affaires communes en notre nom. Sur chacun des secteurs de la vie sociale dans laquelle elles sont engagées, les organisations de la société civile peuvent exprimer les besoins de la population, formuler des propositions, interroger les acteurs politiques qui postulent à l’exercice du pouvoir sur leurs projets de société, sur leurs propositions. La société civile peut être un acteur irremplaçable et indispensable de la vie démocratique du Burundi. Elle ne se dérobera pas à cette responsabilité.

Excellences, Honorables, Mesdames, Messieurs, Distingués invités,

Je m’en voudrais enfin de clôturer mon allocution sans exprimer ma profonde gratitude à tous les partenaires qui ne cessent, sous une forme ou sous une autre, à soutenir les actions de la société civile. Je remercie tous ceux qui ont soutenu cette journée et particulièrement vous tous qui avaient accepté de répondre à notre invitation, en dépit d’un calendrier que je sais suffisamment chargé.

Je vous remercie de votre attention. … Je posais au début de mon intervention la question « qu’est-ce qu’un bon acteur de la société civile ?  », je pense que je viens de vous exposer tous les aspects de la mission que chacun de ceux qui s’engage de sa propre initiative au service du bien commun, accepte d’assumer. Cette mission est noble, elle mérite d’être protégée, reconnue, distinguée comme nous allons le faire dans un instant. Mais cette mission peut parfois s’avérer dangereuse. Notre compagnon et ami, le regretté Ernest Manirumva, vice président de l’OLUCOME, a payé son engagement de sa vie. Il nous est difficile de nous réjouir en cette occasion sans évoquer tout d’abord sa mémoire. C’est pourquoi je vous propose une minute de silence en sa mémoire. Je vous remercie.

Je présens l’impatience de connaître qui est finalement ce meilleur acteur de la société civile. Le Prix du Meilleur acteur de la Société civile ne peut valoir tous les efforts d’une organisation de la société civile, il est avant tout un encouragement. Cette année le prix sera remis à une organisation féminine, en sachant que beaucoup d’autres le méritent. Compte tenu des circonstances particulières qu’a traversées la société civile cette année, nous allons décerner, en plus du Prix du meilleur citoyen, un prix spécial du jury.

Maintenant j’invite deux éminents acteurs de la société qui vont finalement nous dévoiler les noms des lauréats des deux prix.

 

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