Les parlementaires tax ?s

vendredi 13 mars 2009,par Jean Bosco Nzosaba

Les parlementaires burundais, tout comme les Ong, paieront désormais les taxes sur l’importation de leurs véhicules et matériels de travail, qui en étaient exonérées. Une contribution utile au budget de l’État à condition que les services douaniers ne soient pas corrompus…Plus de 78 milliards de Fbu (plus de 78 millions de dollars), c’est ce que perdait, chaque année, le Trésor public burundais en exonérant de taxes de douanes, les produits (véhicules, matériels de travail notamment) importés par les parlementaires et les Ong. Soit près de 10 % du budget de l’État en 2009.

La loi budgétaire votée en fin d’année dernière a supprimé ces exonérations. Mi-février les services du ministère des Finances ont précisé que seules les ambassades couvertes par les conventions internationales continueront à ne pas payer de taxes sur leurs importations. Selon Donatien Bwabo, le porte-parole du ministère, le gouvernement ne pouvait pas combler le déficit du budget, majoré de 40 % par rapport à celui de 2008, en exerçant une pression fiscale supplémentaire sur les autres contribuables. Début 2009, en effet, les prix des produits de base comme le carburant, la bière, le sucre… ont déjà été augmentés de 20 %. Le prix des immatriculations des véhicules et des motos a lui aussi été augmenté dans les mêmes proportions. Comme les aides extérieures devraient chuter de 18 %, faire contribuer tous les Burundais au budget national, est considéré comme la seule alternative possible.

Quelques parlementaires, qui ont mis sur pied des associations diverses (développement, renforcement de la justice…) estiment cependant que les biens importés hors taxes aidaient à la promotion de nombreux habitants. Ce n’est pas l’avis d’autres pour qui payer les taxes est un acte citoyen. Ils craignent seulement que la mesure prise ne soit inefficace à cause de la corruption de ceux qui sont chargés de percevoir ces taxes. La crainte de ces nouveaux contribuables est d’autant plus fondée que des rapports et études récents épinglent effectivement douaniers et autorités politico administratives. Dans "Une étude diagnostique sur la gouvernance et la corruption au Burundi", publiée en mai 2008 par le ministère de la Bonne gouvernance, les entrepreneurs et les Ong, principaux importateurs de matériel, déclarent "avoir souvent payé des pots-de-vin dans leurs rapports avec les services douaniers". Le rapport de l’année 2008 de l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME), publié en février 2009, ne ménage pas non plus les services des douanes et recommande à l’État de recouvrer près de 25 milliards de Fbu (plus de 25 millions de $) perdus dans des actes de corruption. L’Observatoire juge la lutte menée par le gouvernement inefficace. Selon lui, en dehors des actions de moralisation faites lors de rencontres fortement soutenues par des bailleurs, aucune politique claire n’est à même d’endiguer le détournement des deniers publics. Il fait remarquer que les institutions spécialisées comme la Brigade anticorruption et le Parquet général près la Cour anticorruption "ne sont pas compétentes pour connaître les cas de corruption et les malversations économiques dont se rendent coupables les autorités politico-administratives du pays". Pour bon nombre d’analystes, la privatisation des services des douanes, longtemps envisagée, mais sans cesse différée, pourrait mettre un terme à ces détournements pour le plus grand profit de tous les Burundais. Selon Patrick Ndayishimiye, expert fiscaliste au ministère des Finances, un projet dans ce sens est déjà sur papier.

 

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