La coop ?ration europ ?enne dans tous ses ?tats …

mardi 3 mai 2011,par Jean Bosco Nzosaba

CONCORD - Plate-forme des ONG belges

// Une Europe ouverte sur le Monde // Bulletin d’information francophone

Réalisé par le Centre national de coopération au développement – CNCD-11.11.11

Numéro 41 - mai 2011

1. La coopération européenne dans tous ses états …

Les suites du livre vert sur la coopération : Le Commissaire et société civile sont-ils sur la même longueur d’ondes ?

Lors de son intervention devant les ministres européens de la coopération, le 22 février dernier, le Commissaire Piebalgs a dressé un premier bilan de la consultation réalisée sur son livre vert concernant le développement. Plus de 200 contributions ont été réceptionnées et le Commissaire a promis d’en tenir compte en rédigeant sa communication sur le sujet annoncée pour septembre. Le rapport effectué par le Commissaire aux ministres européens (manifestement assez satisfaits des résultats) n’a cependant pas manqué d’inquiéter les ONG. Parmi d’autres, trois passages du discours éveillent bien des craintes.

Société civile et croissance inclusive Récupérant les analyses de la société civile, Mr Piebalgs trouve dans les contributions de celle-ci un appui à la priorité qu’il veut donner à une croissance inclusive et au secteur privé. Le Commissaire donne d’ailleurs dans son discours une curieuse image des ONG … qui se préoccuperaient, de façon un peu désuète, essentiellement de social. Il semble que bien des nuances se soient perdues en chemin.

Différentiation Par ailleurs, loin des analyses des ONG qui veulent voir la coopération lutter contre les inégalités, le Commissaire donne sa vision de ce qu’il appelle la “différentiation”. Pour lui, le soutien au développement humain devrait se concentrer sur les pays qui ne remplissent pas encore les conditions pour développer une croissance inclusive telle qu’il l’entend, tout en y appuyant cette dernière notamment par le développement du secteur privé. Par contre avec les pays qui ont créé les conditions d’une croissance inclusive, l’Europe devrait canaliser des moyens pour soutenir celle-ci en lien avec le secteur privé et les Etats membres. Bien peu est dit sur le renforcement de la société civile dans ses efforts pour justement mobiliser les ressources locales. Par ailleurs, pour le Commissaire, certains pays n’auraient plus besoin d’aides financières : avec ceux-ci, l’UE devrait construire des partenariats politiques (notamment sur les migrations et le climat) et commerciaux.

Cohérence Mais le plus grave apparaît en fin du discours : Mr.Piebalgs y insiste sur la cohérence des politiques européennes mais ne centre pas cette dernière autour d’un objectif de réduction de pauvreté. Pour lui, la cohérence doit aussi se faire faire en fonction des autres politiques européennes. Si cela devait se confirmer, il s’agirait là d’un tournant inquiétant puisque jusqu’à présent, les ONG espéraient au moins de leur Commissaire au développement une farouche défense d’une cohérence des politiques européennes autour de ce dernier.

Le Commissaire a-t-il voulu faire plaisir aux ministres européens ? Tient-il un double langage, changeant d’optiques selon les interlocuteurs ? Ou l’a-t-on mal compris ? Quoi qu’il en soit, lors d’une longue rencontre avec le Forum politique de CONCORD en mars, il s’est efforcé de nuancer ses propos. Ainsi s’il reste convaincu que ONG et institutions peuvent s’entendre sur le caractère indispensable d’une croissance économique pour soutenir le développement, il a cette fois souligné que pour lui, le but n’était pas la croissance mais la lutte contre la pauvreté et que la croissance devait être soutenable et inclusive, évaluée en fonction de sa contribution à cette dernière. Il a voulu insister cette fois sur le rôle que doit jouer la société civile et démentit que l’aide serait à l’avenir plus conditionnée par les intérêts stratégiques et politiques de l’UE. Ce sont les besoins, les ambitions, les capacités, mais aussi les efforts des pays partenaires qui devraient définir les niveaux d’aide !

Mr. Piebalgs a également affirmé que son souci d’une aide plus efficace ne cachait pas une volonté de réduire celle-ci en quantité et intensité. C’est tout le contraire, soutient-il. L’argent doit être utilisé avec détermination pour générer de meilleurs résultats. Cela passe par une coordination accrue entre donateurs mais aussi en ciblant l’aide européenne sur les pays/secteurs où elle peut réellement contribuer à mettre les fruits de la croissance au service de toute la population et non seulement d’une élite. Enfin, sur la cohérence, le Commissaire a tenu à préciser que s’il souhaite plus de synergies entre les politiques européennes, c’est bien en faveur des intérêts de la coopération au développement. Une réponse qui en a rassuré certains mais pas tous comme le montre la réaction (en annexe 1, en anglais) du Forum politique de CONCORD qui continue à s’inquiéter notamment des réalités cachées derrière le concept de « croissance inclusive  » cher à Mr. Piebalgs.

Quelle place en Europe pour les organisations de la société civile ?

Le dialogue structuré entre les organisations de la société civile, les autorités locales et les institutions européennes (appelé aussi le quadrilogue) touche à sa fin. Les conclusions en seront discutées lors d’une conférence de « haut niveau  » à Budapest mi- mai. CONCORD et plusieurs de ses membres ont été très actifs durant tout le processus de discussions. Il n’est donc pas étonnant que ce soit de ce côté que viennent les propositions les plus précises. En résumé, quelles sont-elles ?
  dédier 15% de l’aide européenne au financement des organisations de la société civile actives dans le champ du développement. Sur base des chiffres 2009 et sans tenir compte de l’aide humanitaire, cela représenterait 1,6 milliards d’€
  Veiller à plus de complémentarité entre les lignes de financements géographiques et thématiques en vue de garantir plus de flexibilité dans l’attribution des fonds
  Renforcer les programmes thématiques plus particulièrement en matière de renforcement de la société civile, de Droits humains et de liens entre urgence- réhabilitation et développement o Garantir que 15% des fonds géographiques (basés sur les documents pays) soient destinés à soutenir des programmes d’organisations de la société civile y compris toutes formes de partenariat (Sud-Sur, Nord-Sud…). o Revoir l’instrument destiné à la société civile qui devrait compter sur au moins 25% (400 millions) du montant global alloué par l’UE à la société civile pour soutenir des projets et programmes, sa structuration, l’éducation au développement ainsi que la formation, le renforcement des capacités et les campagnes. Remarquons que Concord soutient l’abandon des termes « acteurs non étatiques  » pour utiliser celui d’organisations de la société civile (OSC) o Mettre en place une approche qui lie urgence, réhabilitation et développement capable de faire face aux désastres et de combler le trou entre le financement de l’aide humanitaire et celui du développement à long terme. o Renouveler et élargir un instrument destiné à promouvoir les Droits humains et les processus démocratiques, notamment les conventions des Nations Unies La conférence de Budapest devrait déboucher sur une déclaration commune qui alimentera également les débats sur le futur cadre financier pluriannuel de l’Union

CONCORD fait aussi une proposition de divers types de financement qui, si elle ne questionne pas fondamentalement les procédures d’appels à projets, comporte une série d’autres mécanismes plus souples et adaptés aux besoins des ONG

L’Europe promeut-elle des investissements qui riment avec développement ?

Au cours des dernières décennies, les états membres de l’UE ont signé plus de 1 200 « Traités bilatéraux d’investissement  » (TBI ou BITs en anglais) visant à protéger leurs investisseurs actifs à l’étranger. Les TBI accordent aux sociétés multinationales le droit de mettre en cause les législations sociales, environnementales et économiques des gouvernements si celles-ci sont susceptibles de porter atteinte à la rentabilité de leurs investissements. La plupart des TBI donne à ces sociétés la possibilité de contourner les tribunaux domestiques et d’intenter des actions contre des États souverains devant des panels d’arbitrage internationaux. Le Traité de Lisbonne a transféré les compétences en matière d’investissement étranger des 27 États membres vers l’Union Européenne. La Commission et le Conseil européens ont, tous deux, adopté des positions dans la ligne directe des ABI des Etats membres, malgré toutes les failles qu’ils présentent. Dans une résolution adoptée le mercredi 06/04, le Parlement européen reconnaît néanmoins le droit des Etats à mettre des règles notamment en matière de protection de la sécurité nationale, de santé publique, d’environnement, de droits des travailleurs et des consommateurs, de politique industrielle et de diversité culturelle. Il demande l’inclusion de clauses sociales et environnementales effectives dans les chapitres sur l’investissement des futurs accords de libre-échange (ALE), et que la Commission examine l’inclusion de celles-ci dans les futurs ABI autonomes. Il invite à envisager l’intégration de clauses interdisant l’affaiblissement de la législation sociale ou environnementale pour attirer les investissements dans les futurs ABI. Quelques pas en avant donc mais, comme en atteste le communiqué (en annexe 2) publié par la coalition « travail décent  », des pas encore bien trop timides pour concourir au renforcement d’un développement réellement équitable et durable. 2. Accords et Désaccords

Europe, Colombie, Pérou : les accords en chemin

Les Accords entre l’Union européenne, le Pérou et la Colombie, dont la négociation a pris fin en mai dernier, ont entrepris leurs longues pérégrinations au sein des institutions européennes. On ne reviendra pas ici sur les nombreuses critiques formulées à leur égard par la société civile des deux continents (et que l’on trouvera résumées dans le manifeste en annexe 3). Leur cheminement va maintenant suivre un itinéraire semblable à celui de l’Accord d’association avec l’Amérique centrale. Ils devraient être transmis au Conseil durant l’été : celui décidera alors de les signer et d’accepter ou non les propositions de la Commission. Il devra notamment trancher sur le statut de ces Accords : s’agit-il seulement d’Accords commerciaux ou d’Accords mixtes exigeant dès lors une ratification non seulement par le Parlement européen mais aussi par les Parlements de tous les Etats membres ? Autre décision à prendre : le Conseil acceptera-t-il (comme d’habitude) la mise en œuvre provisoire du volet commercial de ces Accords après leur ratification par le Parlement européen et pendant leurs longues tribulations par les assemblées des Etats membres ? Les textes devraient parvenir officiellement au Parlement européen en fin d’année pour être discutés et éventuellement ratifiés début 2012. Mais il est certain qu’ils y circuleront auparavant, notamment au sein de la Commission pour le commerce extérieur ‘INTA) C’est pourquoi, la société civile se remobilise peu à peu. Tant pour rappeler aux gouvernements européens leur exigence de débats démocratiques sur ces Accords que pour en souligner les multiples dangers. Face au nouveau visage plus avenant dont veut se pourvoir le gouvernement colombien, il est plus que jamais urgent de souligner les multiples violations des Droits humains qui persistent dans la région et les dégâts que ces Accords risquent de causer notamment à ses populations les plus faibles.

Comment financer la stratégie UE-Afrique ?

Les 4 et 5 avril, la « task-force  » conjointe UE-Afrique s’est réunie pour la douzième fois à Bruxelles en vue de passer en revue l’état des discussions dans les 8 partenariats thématiques qui tissent la toile de fond de la stratégie et de discuter de la mise en place du deuxième plan d’action décidé lors du Sommet UE-Afrique de Tripoli en décembre dernier. Divers représentants de la société civile européenne et africaine ont pris part aux travaux qui, par ailleurs, ont soulevé le difficile problème des financements. En effet, on ne peut pas affirmer que le premier plan d’actions (2008-2010) ait été caractérisé par une mise en œuvre intensive des programmes annoncés. Ceci est dû en partie au désintérêt de bien des Etats africains et européens pour la stratégie. Mais aussi à l’absence de ressources propres obligeant les promoteurs de cette dernière à grappiller par ci par là quelques moyens pour leurs ambitions. La Commission a ainsi annoncé qu’elle étudiait la possibilité d’intégrer dans le prochain cadre financier pluriannuel de l’Union (2014-2020) un nouvel « Instrument de financement panafricain  » D’autres instruments ont été mis sur la table : ainsi les Africains penchent-ils vers une « facilité africaine d’intégration  ». Que ce soit sur l’une ou l’autre, tout le monde est d’accord qu’il faut avancer. Des questions cruciales restent à trancher : qui gèrera ces instruments ? Comment seront sélectionnées les actions qui méritent un financement. Les deux parties se ont déjà mises d’accord sur certains principes : le soutien doit aller à des actions qui présentent une réelle plus-value (mais par rapport à quoi ?), qui ait une dimension régionale, continentale ou intercontinentale et qui respectent le principe de subsidiarité. Tout cela reste assez vague. Et en attendant, le deuxième plan d’actions doit compter sur les instruments existants… comme les fonds intra ACP et les enveloppes régionales budgétisées dans le Fonds européens de développement (FED). Mais est-ce le rôle de celui-ci de jouer la roue de secours pour une stratégie que n’envisage pas l’accord de Cotonou ? Un thème qui sera notamment à l’ordre du jour le 10 mai lors d’une rencontre à Bruxelles des deux comités de pilotage (africain et européen) de la société civile.

Cotonou à la sauce cohérence

Nous assistons à une prise de conscience croissante des effets potentiellement dommageables pour les citoyens des pays en développement des incohérences entre politiques de l’UE. Ce débat concerne bien évidemment la mise en œuvre de l’Accord de Cotonou dont les 3 piliers (politique, développement, commerce) peuvent susciter bien des contradictions. Le principe de cohérence est reconnu par l’article 12 de l’Accord. (Voir en annexe 4 une fiche à ce propos élaborée pour l’Assemblée Parlementaire Paritaire UE-ACP de mai) Les premières consultations formelles dans ce cadre se sont tenues à l’initiative des Etats ACP en février 2009. Le groupe ACP avait demandé des informations concernant cinq initiatives de la Commission relatives à l’utilisation de pesticides, de substances à base de nickel, aux réglementations portant sur la chaine du froid pour la pêche, à la directive sur les énergies renouvelables, et à la gestion durable des forêts. La Commission a répondu aux préoccupations des pays ACP en indiquant que ces propositions pourraient avoir un impact significatif sur l’exportation de certains produits vers l’UE. Elle a assuré aux représentants ACP que leurs préoccupations seraient prises en compte dans la préparation de ces mesures ou dans leur mise en œuvre. Les représentants ACP ont indiqués que leurs Etats aimeraient être impliqués aussi tôt que possible dans la préparation de toutes les mesures qui pourraient affecter leurs intérêts.

3. L’Europe en forum(s) et campagnes Evaluation de la présidence belge de l’Union

Sur base des revendications qu’elles avaient mises en avant à l’occasion de la Présidence belge de l’Union européenne au second semestre 2010, les ONG ont publié leur évaluation du rôle joué par celle-ci dans les domaines de l’aide au développement, des changements climatiques, du travail décent et de la souveraineté alimentaire. On trouvera cette publication en cliquant sur http://www.cncd.be/Presidence-belge-de-l-UE-un-bilan La société civile présente en force à l’Assemblée Parlementaire Paritaire UE-ACP (APP) de Budapest La prochaine réunion de l’APP approche à grands pas. La Plénière aura lieu à Budapest (Hongrie) du 16 au 18 mai.

Les ONG européennes y seront présentes. Une formation sur les enjeux de l’Accord de Cotonou sera organisée le 13 mai avec la plate-forme hongroise. Durant l’assemblée, deux déjeuners débats sont en préparation. Le premier, organisé par le CFSI, membre de Coordination Sud (la plate-forme française) et du groupe de Concord sur la cohérence des politiques, en collaboration avec SOS Faim et Actionaid invitera les parlementaires à un échange sur les retombées au Sud de la politique agricole commune (PAC). Un débat sur le même thème est inscrit à l’agenda de l’Assemblée dès le lendemain. Le second traitera des retombées du traité de Lisbonne sur les relations UE-ACP et est organisé par le groupe Cotonou de Concord Ici aussi un rapport est en voie d’élaboration par la Commission des Affaires politiques de l’APP et il sera débattu en plénière lors de l’Assemblée suivante prévue du 21 au 23 novembre en Sierra Leone. Deux thématiques importantes sur lesquelles organisations de la société civile et parlementaires peuvent travailler de concert. Des représentants de plates-formes paysannes et d’ONG ACP se joindront d’ailleurs à ces importants moments de plaidoyer.

L’Europe appelée à renforcer son engagement face à l’utilisation des minerais en République Démocratique du Congo

On sait combien l’exploitation des minerais en RDC alimente les conflits dans la région. L’Union européenne pourrait faire plus et mieux pour éviter l’utilisation illicite de ces ressources naturelles, tout en préservant les intérêts légitimes des populations locales. C’est en ce sens que de nombreuses organisations de la société civile impliquées en Afrique centrale et regroupées au sein des réseaux EURAC et FATAL TRANSACTIONS interpellent l’Union européenne et ses Etats membres dans le document que l’on trouvera en annexe 5

 

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