Les ?lections communales pollu ?es par les pr ?sidentielles

mardi 25 mai 2010,par Jean Bosco Nzosaba

Les élections communales polluées par les présidentielles

(Syfia Grands Lacs/Burundi) Au Burundi, les candidats aux présidentielles ont fait activement campagne à la place des candidats aux communales du 21 mai. Le résultat de ces élections locales aurait valeur de test pour eux. La société civile dénonce cette irrégularité.

Les Burundais éliront leurs conseillers communaux le 23 mai, et non le 21 mai comme prévu, le scrutin ayant été repoussé au tout dernier moment. Dix-huit partis politiques sur les 44 agréés ont aligné leurs candidats pour ce premier scrutin d’une série de cinq, prévus en 2010. Depuis le 5 mai, les candidats en campagne électorale remuent monts et vallées jusqu’au fin fond du pays pour rassurer les militants et arracher les voix des indécis. Mais curieusement, ils évoluent à l’ombre des candidats aux élections présidentielles qui drainent des foules et tiennent le haut du pavé. Profitant des différents meetings pour prendre la parole et exposer leurs programmes, en lieu et place des candidats conseillers communaux, ils leur ont, volé la vedette. "Tous les grands meetings sont largement dominés par les candidats aux présidentielles, soutenus par les grandes figures de ces mêmes partis venus souvent de Bujumbura. La population est chaque fois invitée à voter pour le candidat du parti en question aux présidentielles", remarque Arthémon Niyondiko, enseignant. À l’occasion, le parti distribue bière à profusion, tee-shirts, casquettes et autres à l’effigie de son candidat.

Tout promettre pour mieux convaincre "Reconduire le CNDD-FDD, c’est choisir la paix et la sécurité", clame Pierre Nkurunziza, actuel président de la République et candidat à sa succession. "Choisissez le MSD pour rompre avec l’injustice", rétorque l’ancien journaliste Alexis Sinduhije, candidat aux présidentielles. "Si je suis élu président, renchérit le Dr Yves Sahinguvu, candidat de l’UPRONA, je commencerai par commander un audit des comptes de l’État pour cette dernière législature afin de faire la lumière sur les nombreux crimes économiques qui l’ont émaillée." Cette anticipation serait, selon beaucoup, révélatrice de la crainte de perdre les élections. "Nous avons une vingtaine de candidats aux présidentielles, c’est du jamais vu et personne ne sort du lot, car contrairement aux élections précédentes, l’ethnie n’est plus un fond de commerce comme avant", estime Isidore Niyakire, de la Coalition des organisations de la société civile pour le monitoring des élections (Cosome). Les partis mettent donc leurs jokers en première ligne pour impressionner les électeurs et gagner le premier scrutin qui sera certainement décisif pour les suivants. "Les communales vont montrer la véritable envergure de chaque parti en compétition et elles donneront la tendance pour les présidentielles. Certains électeurs changeront de camp en fonction des résultats de ce premier scrutin", pronostique N. Longin du parti MSD.

Rien sur le développement local Les acteurs de la société civile dénoncent énergiquement cette irrégularité, arguant qu’à chaque scrutin correspond son temps légal de campagne électorale. "C’est tout simplement une tricherie, réagit Mohamed Nibaruta, porte-parole de la Cosome, car le temps de la campagne présidentielle, qui n’excède pas deux semaines, doit être fixé par un arrêté de la commission électorale comme l’indique le Code électoral." Rien n’est dit sur les programmes des futurs conseillers communaux, ni sur leur profil. "C’est en réalité une occasion manquée pour chaque candidat qui aurait pu dire aux électeurs ce qu’il envisage de faire pour conduire la population locale à un développement intégral. L’élu local de demain n’aura de compte à rendre à personne puisqu’il n’aura rien promis", regrette Gertrude Kazoviyo, vice-présidente de l’Observatoire de l’action gouvernementale (OAG). Au cours des élections antérieures, les candidats aux communales avaient voix au chapitre. Leur discours était plutôt centré sur la mise en œuvre du Plan communal de développement communautaire (PDCD), feuille de route de la gestion communale. Éclipsés cette fois par les grosses pointures, les candidats aux communales ne s’en offusquent pas pour autant. "C’est du pain béni pour nous, car le candidat aux présidentielles est plus charismatique que moi et il fait campagne pour mon parti, donc ma liste", estime N. P, candidat du Frodebu aux communales. Les électeurs sont appelés à élire une liste bloquée de quinze conseillers communaux pour chaque parti politique en lice.

 

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